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Mission de France : « Les immigrés sont nos frères ».
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Mission de France : « Les immigrés sont nos frères ».

Une quinzaine de membres de la communauté Mission de France, issus de plusieurs équipes présentes dans notre diocèse, ont participé dimanche 21 janvier à la manifestation qui a eu lieu à Paris, entre le Trocadéro et les Invalides, contre la loi immigration adoptée le 19 décembre dernier. Dans une déclaration qui vient d’être rendue publique, la Mission de France s’inquiète des conséquences de cette loi qui doit être prochainement validée, ou non, par le Conseil constitutionnel.

Plus de 400 collectifs, syndicats, partis politiques et associations, dont le Secours Catholique, ont participé à cette manifestation appelant au retrait total de cette loi. Très engagée auprès des migrants, l’organisation caritative met garde contre les effets désastreux de ce texte, qui viendra, selon elle, « précariser des populations en situation de fragilité, complexifier un cadre législatif déjà alambiqué et affaiblir des piliers de notre État de droit ».

« À travers cette loi qui met en cause plusieurs droits fondamentaux, il y a un regard porté sur les personnes en précarité qui nous inquiète », explique Aurélie Radisson, responsable Accueil et droits des étrangers au Secours catholique. « Les personnes en précarité ont toute leur place dans notre société. Et, d’ailleurs, la bonne santé d’une société se mesure à la place qu’on laisse aux plus fragiles et aux plus vulnérables et à l’attention qu’on leur porte. »  L’enjeu, pour le Secours catholique, serait de réussir à faire entendre un autre discours sur l’immigration et à ouvrir des espaces de dialogue et d’écoute sur la question. C’est dans cet esprit que, de son côté, la Mission de France a jugé utile de publier un texte qui, lui aussi, appelle à la tenue d’un débat serein pour porter un regard apaisé sur le sujet de l’accueil des personnes étrangères dans notre pays.

Texte de la Mission de France : « L’hospitalité est préférable à l’hostilité »

Les migrations sont un des phénomènes les plus anciens qui soient. Elles sont liées aux conflits de pouvoir, à la violence, aux conditions climatiques, à l’alimentation, à l’espérance d’une vie meilleure. La mondialisation accélère tant de choses, et les mouvements migratoires n’y échappent pas. Structurée par l’échange économique, la société occidentale veut les filtrer sur ce seul registre, négligeant d’autres formes d’échanges comme la culture, la santé, la connaissance ou les pratiques environnementales plus respectueuses et moins extractives. Installée sur un mode de vie confortable et énergivore, elle a souvent la mémoire courte oubliant qu’elle tient son aisance de racines plus lointaines comme la traite négrière, l’expansion coloniale, l’appel à de la main-d’œuvre bon marché pour ses usines, pour des emplois aux conditions de travail pénibles dont les occidentaux ne veulent plus. Toute forme d’émigration, volontaire ou contrainte, provoque des séparations, des exodes et des déchirements.

En pratiquant l’hospitalité, ce n’est pas la misère du monde, qui est accueillie mais des hommes et des femmes qui ont quitté leur terre familière et pris le chemin de l’exil pour de multiples raisons dont il est impossible de se dédouaner si nous avons un minimum conscience de l’origine de nos richesses. Ce parti pris nous oblige à considérer la possibilité d’établir un espace commun juste. Un espace commun qui rend possible la dignité de tous, avec des droits et des devoirs semblables, sans lesquels aucun apaisement social ne sera possible. Avec le recul, observons que notre société est le fruit de métissages successifs, souvent douloureux, que le temps a apaisé après deux ou trois générations. C’est une tragique erreur de penser une loi immigration de plus sur le registre du rempart et de la barricade hostile. Puisque la République française affiche fièrement la fraternité sur le fronton de ses mairies, quel espace commun durable pourra s’établir avec celles et ceux qui nous demandent l’hospitalité ?

Chrétiens, engagés avec la Mission de France, nous n’avons jamais considéré que la religion nous mettait à part des inquiétudes et des défis contemporains. Au contraire, nombreux sommes-nous à être investis dans l’espace commun de la citoyenneté, de la fraternité avec quiconque, que ce soit avec des personnes migrantes ou en difficultés sociales et familiales. Certes, les fondamentalismes religieux sont un grave problème que nous devons mieux appréhender et mieux combattre. Mais nous ne pouvons nous résoudre à ce que des lois soient votées sur la stigmatisation de l’étranger, attisée par la peur et la suspicion. Immenses sont les drames dans leurs vies, et pourtant, ils ne cessent de croire possible un avenir plus juste, voulant contribuer à la société dans laquelle ils prennent part.

Lors de son voyage à Marseille, le Pape François nous rappelait que « trop de personnes fuyant les conflits, la pauvreté et les catastrophes environnementales trouvent dans les flots de la Méditerranée, [dans le froid des montagnes] le rejet définitif d’un avenir meilleur ». Dans nos sociétés qui se replient, celles et ceux qui affrontent des risques démesurés, se voient refuser les droits de toute personne résidant en France, relégués au statut de citoyen de seconde zone. Ces hommes, ces femmes et ces enfants, souvent stigmatisés, le deviennent encore davantage suite au vote de la loi immigration.

Aujourd’hui, quelques-uns sont reconnus du fait de leur apport réel ou potentiel à la richesse nationale, les autres sont criminalisés. La spiritualité nous appelle à un regard sur la vie qui dépasse les frontières nées des circonstances historiques, des conditions sociales ou des traditions culturelles et religieuses. Porteurs d’un regard spirituel, nous considérons que tout homme, toute femme ont une dignité qui dépasse leur situation économique et professionnelle, leur âge ou leur nationalité. Et pour nous chrétiens, ils sont des frères et sœurs aimés de Dieu.

La présence des personnes migrantes doit nous aider à redire les fondamentaux de la société que nous voulons. Peut-on se résoudre à la clandestinité d’hommes et de femmes qui travaillent et n’auraient pas accès aux soins, à la nourriture, au logement et à l’instruction ? Peut-on penser qu’une société si attachée à l’égalité fasse le tri entre ses membres, sans leur donner les moyens de contribuer positivement à l’espace commun national et européen. Nous croyons de toutes nos forces que l’hospitalité est préférable à l’hostilité. Nous croyons de toutes nos forces que des lois préservant la dignité de chacun vivant sur notre sol contribuent à vivre ensemble plus pacifiquement. Nous croyons de toutes nos forces qu’un espace commun plus juste et plus fraternel sera plus fécond dès maintenant et pour les générations futures.

Au nom de la Mission de France,

Hervé Giraud, évêque-prélat

Henri Védrine, Vicaire général

Anne Soncarrieu, Déléguée générale

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