l'Évêque

Paroles de l'Évêque

Messe Chrismale – 12 avril 2022 – Homélie

Messe Chrismale – 12 avril 2022 – Homélie

Frères et sœurs bien-aimés de Dieu !

        Jésus avait été baptisé dans les eaux du Jourdain, la voix du Père l’avait confirmé dans son identité de Fils, pleinement Fils de Dieu.

        L’évangéliste Luc poursuit avec une généalogie qui inscrit Jésus dans la longue lignée humaine, car c’est bien, pour nous les hommes et notre salut, qu’il est venu. Il est aussi pleinement homme, pleinement Juif, pleinement membre du peuple de l’alliance, d’un peuple choisi mais régulièrement infidèle à la vie en alliance avec Dieu.

        Rempli d’Esprit-Saint (Lc 4,1), Jésus est ensuite conduit au désert et Il tient bon dans le oui, dans la fidélité à Dieu contre les tentations de facilité pour exercer sa mission.

        C’est aussi dans la puissance du même Esprit (4,14) que Jésus enseigne dans les synagogues comme celle de Nazareth et que sa renommée se répand.

        Selon son habitude (4,16), en homme qui pratique sa foi et qui prie, Jésus entre dans la synagogue, dans l’assemblée qui l’a vu grandir. De même au soir de la cène, selon son habitude (22,39), il se rend au mont des Oliviers pour prier.

        Dans la synagogue, comme dans le récit des tentations, il cite les écritures porteuses de la promesse et de l’engagement de Dieu. Il prend le livre, lit le passage du prophète Isaïe mais il interrompt le passage. Il ne cite pas la vengeance de Dieu car Jésus concentre son annonce sur ce pour quoi l’Esprit, le souffle, le dynamisme même de Dieu lui est donné, nous est donné. Pour annoncer ce qui est bon et nouveau de la part de Dieu, pour les hommes, libérer, ouvrir les yeux…

        C’est génial, Super ! Mais alors pourquoi la prédication de Celui qui est rempli d’Esprit-Saint fait que dans la synagogue, des familiers, des voisins, ceux qui l’ont vu grandir, « tous devinrent furieux » à la fin de cette scène évangélique (4,28) ?

        Pourquoi ce message de liberté, de joie, de vie dont nous sommes les témoins n’est-il pas entendu, accueilli, autant que nous le souhaitons?

        Bien sûr nous pouvons nous regarder nous-mêmes et ce que notre église donne à voir et qui doit être amélioré, car l’Église ne peut vraiment évangéliser que si elle commence par se laisser évangéliser disait le saint pape Paul VI

        Des ajustements, les réformes de chacun de nous, de nos communautés, de l’église sont nécessaires. C’est bien le sens du synode diocésain et du synode romain.

        Mais, ne rêvons pas ! Cela n’ouvre pas automatiquement les portes de la foi. Des résistances à l’accueil de l’Évangile, hier comme aujourd’hui, tiennent aussi à ce que l’accueil de l’Évangile est inséparable de la conversion, comme nous l’avons entendu au début du carême : convertissez-vous et croyez à l’Évangile ou croyez à l’Évangile et convertissez-vous. « Lannonce de lÉvangile est toujours liée à l’étreinte dune croix concrète. La douce lumière de la Parole produit clarté dans les cœurs bien disposés et confusion et rejet dans ceux qui ne le sont pas. Cela, nous le voyons constamment dans lÉvangile. » (Pape François) Ou pour le dire autrement, ceux qui sont petits, pauvres, malades sont les premiers à accueillir la nouveauté de l’Évangile alors que ceux qui se croient grands, riches, bien portants sont pris à contre-pied.

  • Ce que Jésus proclame et vit, vient déranger nos habitudes, notre confort, nos « oui, mais ! », nos peurs de perdre… Les catéchumènes qui seront baptisés à Pâques mesurent bien ce que la foi vient bousculer dans leurs vies.
  • Même nos générosités peuvent comporter des résistances et incohérences qui nous font accueillir plus facilement le Christ dans le réfugié ukrainien que dans celui qui arrive du Soudan.
  • L’excès du commandement nouveau à cause du « comme je vous ai aimé », l’excès de la surabondance de Dieu, comme l’excès des prophètes, suscitent en nous bien des résistances.
  • Il n’est pas si simple que cela de marcher au pas de Dieu, au pas de l’engagement de Dieu pour le monde. Souvent, comme le peuple de Dieu, nous sommes à côté de la plaque. Comme les disciples au soir de la cène, plus préoccupés de savoir lequel d’entre eux est le plus grand, que de ce qui est vraiment en jeu : le combat fidèle de l’amour qui se donne : ceci est mon corps livré pour vous, faites ceci en mémoire de moi.

        Nous ne vivons pas dans un monde parfait, mais dans le monde des hommes de ce temps que Dieu aime.

        Nous ne sommes pas une église parfaite, mais une église de saints et pauvres pécheurs d’aujourd’hui appelés à mettre en musique l’homélie brève, étonnante de Jésus : « Aujourd’hui saccomplit ce passage de l’Écriture que vous venez dentendre. »

  • Annoncer la disparition de ce qui fait mal aux hommes que Dieu aime. Car nous pouvons, aux cœurs de nos pauvretés et fragilités, accueillir ce qui est bon et nouveau de la part de Dieu, un regard, une parole, une présence qui ne condamne pas, qui redonne une dignité: toi aussi tu es aimé de Dieu.
  • Nos chaînes intérieures et extérieures, nos prisons, nos esclavages n’empêchent pas un chemin de liberté, car avec Lui, le Christ, un chemin est toujours possible.
  • La lumière de la raison, la lumière de la foi, la lumière de l’Esprit-Saint peuvent vaincre nos anesthésies du regard qui refusent de voir la réalité et freinent les conversions non pas d’abord ou seulement celles des autres, mais les nôtres, la mienne.
  • Les opprimés, les petits, les fragiles, ceux qui ne comptent pour rien ou pour pas grand-chose dans une société d’efficacité, de performance, de force… ont une égale dignité dans le peuple de Dieu. Cette semaine le visage de l’homme de la passion vient révéler « le vrai sens de la valeur et de la dignité humaine. C’est au moment où le Christ n’a plus aucune apparence, qu’il apparaît sans beauté, sans éclat, sans avenir, muet et rejeté par les hommes, qu’il est l’homme par excellence. L’icône démasque alors toutes nos fausses images de la dignité humaine qui reposeraient sur la beauté, l’autonomie, la santé, la maîtrise de l’avenir… ».

        Si l’homélie de Jésus est brève n’est-ce pas pour nous inviter à reconnaître que la plus belle homélie n’est pas d’abord dans les mots (même s’il nous faut les préparer, les méditer).

        La plus belle homélie est dans l’aujourd’hui de ce que la vie des chrétiens et la vie des communautés chrétiennes donnent à voir, déjà à voir de ce que suscite la parole vivante et engagée de Dieu Jésus, le Christ.

Vous recevrez une force celle de l’Esprit-Saint et vous serez mes témoins….

        Nous renouvelons, frères prêtres et diacres, nos engagements d’ordination et avec tous les baptisés nous renouvellerons la foi de notre baptême. Pour tenir encore et encore, reconnaissons que nous avons besoin de nous laisser conduire par l’Esprit. Nous pouvons lui demander de réchauffer ce qui est froid, redresser ce qui est tordu, d’assouplir ce qui est raide… dans nos vies personnelles, nos intelligences, nos regards, nos aspirations, l’exercice de nos responsabilités, de nos charismes et ministères. 

Amen

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