l'Évêque

Paroles de l'Évêque

Homélie de la messe chrismale 2023

Homélie de la messe chrismale 2023

Préparée par l’aumônerie de la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis

Frères et sœurs bien aimés de Dieu

« Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Écriture que vous venez d’entendre.»

Mais qu’avons-nous entendu ? Le début du chapitre 61 du livre d’Isaïe. Le peuple qui a connu la joie du retour du long exil à Babylone connaît le découragement. Il n’est plus en exil ou en prison mais il reste sous la domination des Perses. Les habitants de Jérusalem connaissent le découragement devant  l’ampleur de la tâche d’une reconstruction longue et onéreuse de la ville et du Temple. Les riches s’enrichissent et les pauvres sont exploités. Les habitants de Jérusalem découvrent, ce que nous expérimentons régulièrement. Il existe dans nos vies d’autres prisons, d’autres chaînes, moins matérielles, mais tout aussi oppressantes.

Dans les difficultés, les épreuves ou le découragement rencontrés, la tentation de croire que Dieu a abandonné son Peuple est souvent là, comme le rappelle bien des cris des psaumes. Poussé par l’Esprit, le prophète proclame que dans les méandres de l’histoire, Dieu ne laisse pas tomber son alliance. Il compte sur lui, le prophète, comme il compte sur son peuple pour une mission particulière pour servir son projet d’alliance. C’est pour cela que le souffle de Dieu lui est donné.

Au début de son ministère public, Jésus, à l‘écoute du prophète, trouve les mots qui disent l’actualité de sa mission. Son humanité pleine et entière va coopérer à l’action de Dieu, de son Esprit.

Nous-mêmes, nous sommes devenus chrétiens disciples du Christ. Parmi nous certains se sont engagés dans l’aventure des ministères ordonnés  pas seulement à la force des bras, des poignets et de la volonté. Pourtant il faut bien le vouloir : « Oui je le veux ».  
Mais nous le vivons d’abord en réponse à un appel et un don :  l’Esprit repose sur nous POUR, pour annoncer, prendre soin, guérir, proclamer libération et bienfaits, ce qui est bon et nouveau de la part du Seigneur.

Cela nous rappelle que ce qui est premier ce n’est pas nous, nos organisations, nos projets mais l’Esprit-Saint. Il est le premier protagoniste, acteur de la mission, de la mission de l’Église et de celle de tous ses membres.

C’est Lui qui dans l’aujourd’hui de chaque génération nous entraîne à servir le projet de Dieu pour tous les hommes que Dieu aime, son projet d’alliance qui nous associe à son dynamisme de vie et d’amour avec lui et entre nous.
Il s’agit pour nous, comme sur un voilier, de savoir prendre le vent de l’Esprit et ne pas s’époumoner ou s’essouffler à vouloir faire avancer le voilier en soufflant dessus. Nous avons toujours à prendre le vent de l’Esprit, pour emboîter le pas de l’engagement de Dieu pour le monde qu’il aime.

La prière eucharistique pour la réconciliation nous fait dire : « maintenant que ton peuple connaît un temps de grâce et de réconciliation, Tu lui donnes de reprendre souffle en se tournant vers toi et d’être au service de tout homme en se livrant davantage à l’Esprit-Saint ».
Frères prêtres, frères diacres, frères et sœurs engagés dans la mission que le Seigneur confie à son Église, pour tenir bon en tenue de service, il est vital pour chacun d’entre nous :

  • d’entretenir une intimité profonde avec celui que nous appelons le Seigneur de nos vies, pour communier à son service de l’engagement de Dieu des hommes qu’il aime. Communier (cum munus), vous savez c’est porter la charge avec lui, sachant qu’il porte plus que nous ;
  • de nous livrer davantage à l’Esprit-Saint. Nous laisser entraîner à rejoindre et rencontrer ceux chez qui l’Esprit-Saint travaille avant même que nous soyons nous-mêmes au travail. Notre travail c’est d’aider à reconnaître la présence, l’amour de Dieu.

Vivant cela, nous pourrons, comme tous ceux sur qui repose l’Esprit-Saint, coopérer à l’action de Dieu qui change la vie par son amour qui prend soin et ouvre un chemin qui est toujours possible : proclamer libération, consoler, être porteurs de l’onction de la joie.

Cette onction de la joie, elle est donnée avec les huiles que je vais bénir ce soir.

Elle est aussi donnée cette onction de Dieu

  • par la qualité de nos regards qui n’enferment pas,
  • par les paroles qui encouragent, soutiennent et consolent, 
  • par les attitudes qui donnent à voir la vérité de nos paroles,
  • par une présence signe d’une autre présence,
  • par une écoute qui entend les aspirations et les désirs les plus profonds au-delà des mots…
  • par la confiance donnée qui dit que je compte, nous comptons encore sur toi.
  • Par vos mains tendues et ouvertes qui peuvent donner et recevoir ce qui est impossible à une main crispée.

C’est bien pour cela qu’à Pentecôte, et pas seulement, nous demandons le don de l’Esprit-Saint qui comme une huile assouplit les muscles raidis, redresse ce que nous abordons d’une marnière tordue ou faussée, réchauffe les cœurs, comme la parole du ressuscité sur la route d’Emmaüs, dans nos tristesses et nos découragements.

C’est de cela dont vous êtes témoins membres des équipes d’aumôneries de prison, témoins du travail de Dieu qui tel un orpailleur remue ciel et terre pour retrouver ce qui demeure sans prix à ses yeux.
Par votre présence, votre regard aimant, votre patience, votre écoute et votre parole, il vous est donné de percevoir la pépite ou la paillette d’or précieux, d’image de Dieu que Dieu révèle.
Comme cette femme que j’ai confirmée à la maison d’arrêt des femmes, sa vie a été un véritable enfer et elle est là, emprisonnée, portant le poids des conséquences de ses actes et des conditionnements de sa vie. Et c’est là, en prison, privée de liberté, qu’elle a trouvé une libération de ses chaînes. « Le Seigneur m’a incarcérée, et il m’a libérée ! » s’est-elle exprimée dans un cri de joie le jour de sa confirmation, car sa vie était radicalement changée. Elle n’était plus seule à la porter. Aimée, elle retrouvait une capacité à vivre et aimer. À l’aumônerie de la maison d’arrêt, serviteurs et servantes du Seigneur, vous êtes comme des clés permettant à la parole agissante de Dieu de déployer la puissance de libération du Seigneur, de déployer sa force. Merci pour votre service. Et combien d’autres parmi nous dans les services, les missions et les ministères que nous exerçons, pourraient aussi témoigner de cela.

« Oui je le veux », je m’y donne et m’y engage « avec la grâce de Dieu ». La grâce de Dieu qui est un autre nom de l’Esprit-Saint.                       

Amen

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